Dominique Vinay

Titre de la Thèse: La Couronne et la lyre : Présence du Roi David dans la littérature française de la Renaissance.

Date de début de la thèse: 1996

Date de soutenance: Lundi, 8 Décembre, 2003

Directeur (trice): Marie-Luce Demonet

Résumé: 

Tel un triptyque, notre travail s'articule en trois temps. La première partie s'intéresse au modèle politique de David à la cour de France à l'aube de la Renaissance. Dans les libelles de propagande, les gravures, les spectacles donnés lors des entrées royales, Charles VIII est exhorté à se conformer à David combattant et François Ier, à David triomphant. Cette tradition deviendra un lieu commun de la conception française de la royauté, si bien qu'on en retrouvera le motif encore sous Henri III, émule de David pénitent dans les processions de ses confréries.
Un glissement des formes s'opère avec la Réforme dans la représentation du prophète en France : avec Calvin, les protestants traduisent le psautier et font de la poésie biblique le grand modèle de la prière réformée. Au théâtre, le personnage devient une allégorie animée des aspirations religieuses et politiques de la nouvelle Eglise : la Déconfiture de Goliath de Joachim de Coignac (1551), Saül le furieux de Jean de la Taille (1562) ainsi que les Tragédies saintes de Luis des Masures (1566) font du psalmiste le patron des persécutés par le Pape et la couronne catholique. Cette récupération protestante de la figure fera l'objet de notre deuxième partie.
Nous verrons enfin que ce n'est pas seulement dans son rapport entre foi et pouvoir que David nourrit la culture du temps. La Bible raconte que dès sa jeunesse David fut l'ami des arts, le poète et le musicien de la cour d'Israël. Il est, en quelque sorte, à l'origine du lyrisme chrétien. Les poètes de la Pléiade (en particulier Belleau et Du Bellay), épris de la poésie mesurée à la lyre dont la psalmodie fut un premier modèle, y virent une référence. leur désir de réunifier parole et musique amena la création des premiers mouvements académiques français, l'Académie de poésie et de musique de Baïl et, sous Henri III, l'Académie du palais.
Cette forte récurrence du modèle davidique au XVIe siècle indique qu'on ne peut comprendre l'image que la nation française se faisait d'elle-même sans remonter aux archétypes de l'époque. Il est clair que les enjeux religieux, politiques et culturels qui traversent le siècle s'accommodaient parfaitement d'un sujet biblique où le berger abat un géant (David et Goliath) et où le roi est à la fois prophète et poète. Mais encore faut-il chercher à savoir dans quel(s) cercle(s) intellectuel(s) et académique(s) le thème de David prit le plus d'importance et comment il s'y est développé et métamorphosé. Pour rendre raison de la convergence et des glissements des motifs en un même lieu rhétorique et figural, il faut qu'à un moment donné des enjeux nationaux et un projet esthétique et/ou moral se rencontrent. Le recours des princes, des pasteurs et des poètes à une même thématique ne saurait être fortuite inventio et appelle une réflexion doctorale.