Cyril Peltier

Titre de la Thèse: Autour des origines artistiques du sculpteur Juan de Juni (1507-1577)

Date de début de la thèse: 2005

Date de soutenance: Mardi, 16 Décembre, 2008

Directeur (trice): Yves Pauwels

Résumé: 

Comme nombre de ses compatriotes (Jean d’Angers, Philippe de Bourgogne, Etienne Jamet...), Jean de Joigny (1507-1577), sculpteur d’origine française, s’exila en Espagne au moment de la florissante période du Siècle d’Or, attiré par les possibilités de travail et d’enrichissement. On situe l’arrivée de Jean de Joigny sur le sol ibérique aux alentours de 1535. Après quelques travaux en tant qu’artiste itinérant, à Léon, Medina de Rioseco, Salamanque, il établit définitivement son atelier à Valladolid en 1540. Entouré de riches commanditaires issus de la noblesse et du clergé, l’artiste bourguignon y forma aux côtés de Alonso Berruguete et Gregorio Fernandez l’école de sculpture de Valladolid. Il réalisa au total en Espagne une cinquantaine d’oeuvres, principalement en bois polychrome, consacrées à la Passion du Christ et au culte marial.
Aussi n’est-il pas étonnant que cette intense activité transpyrénéenne ait amené les Castillans à considérer Jean de Joigny comme un artiste espagnol à part entière, qu’ils connaissent sous le nom de Juan de Juni. En réaction à ce réflexe d’appropriation, notre travail de thèse consistera redéfinir les limites de l’oeuvre de Juan de Juni en dehors de la sphère artistique ibérique en mettant en évidence le caractère cosmopolite et la polyvalence stylistique d’un sculpteur né en Bourgogne, formé en Italie et établi en Espagne. En ce sens, nous tenterons de faire la lumière sur les trente premières années de sa vie en retraçant son parcours formateur, depuis ses premières oeuvres en Bourgogne jusqu’à son établissement à Valladolid en passant par son long séjour transalpin.
Les origines de l’artiste, né vraisemblablement vers 1507 à Joigny, restent relativement obscures puisque les archives de sa supposée ville natale disparurent lors d’un incendie survenu en 1530. On estime cependant que le sculpteur reçut une première formation artistique dans la région bourguignonne où il fut particulièrement marqué par l’oeuvre des artistes de l’école de Dijon, Claus Sluter en tête, et par la thématique des Mises au tombeau. Nous tâcherons donc de montrer en quoi la ville de Joigny et la région bourguignonne constituent le creuset artistique de l’oeuvre de Juan de Juni.
Avant son départ en Espagne, on peut penser que le sculpteur effectua également un long séjour en Italie vers 1525, même s’il n’existe là encore aucun document officiel ni aucune œuvre portant sa signature qui accréditerait sa présence de l’autre côté des Alpes. Nos hypothèses sont fondées sur des indices artistiques, en raison de similitudes avec le style des grands maîtres italiens de la Renaissance : Michel-Ange, Mazzoni, Donatello, della Quercia, dell’Arca entre autres. Là encore, notre travail consistera à jalonner le parcours transalpin de l’artiste par quelques étapes : Rome, Bologne, Florence et Modène.
À la suite de cette période de formation en Italie, nous pensons que Juni revint à Joigny où il réalisa ses premières œuvres, dont une statue équestre de saint Thibault. Seulement, l’incendie de 1530 dut le convaincre de quitter définitivement sa région natale et de rejoindre la péninsule ibérique. Nous chercherons donc à retracer son itinéraire jusqu’en Espagne en exploitant l’hypothèse d’un détour par l’abbaye de Solesmes et d’une halte prolongée dans le Midi de la France, dans les régions du Roussillon et du Languedoc, avant de rejoindre Léon.
Encore une fois, en s’attachant à jalonner le parcours initiatique formateur du sculpteur Juan de Juni, il nous incombera d’insister sur le caractère assimilateur de l’artiste, formé en pleine période du classicisme français, nourri des prémices du maniérisme italien et baigné dans l’atmosphère baroque du Siècle d’Or à son arrivée en Espagne.